Parcours de Secouriste #1 : Le concours de gardien de la paix

Le métier de secouriste ne laisse personne indifférent, et pour cause ces professionnels sont les garants de notre sécurité en altitude. Antoine Rolle s'est lancé le défi de rejoindre les rangs des secours et nous partage son expérience. Un parcours qui commence par le concours de gardien de la paix, première étape de cette aventure.

Chacun d’entre nous a déjà levé les yeux au ciel pour voir passer l’hélico du secours en montagne. Pour ma part, j’étais très jeune. Je me souviens d’un albatros fendant l’air et un « whaouuu ! » sortant de ma bouche. À la fois impressionné mais sans forcément comprendre la réalité du métier de secouriste. La vie passe, on grandit et les projets se diversifient vers des études et des orientations différentes. Mais l’idée de faire partie de la famille du secours en montagne restait cachée dans un coin de ma tête. La beauté du métier, l’exigence professionnelle demandée aux secouristes, l’omniprésente passion pour la montagne, et bien d'autres aspects qui résonnent en moi et me motivent.

Comme pour ne pas tout mélanger, c’est après le diplôme de guide que je décide de me réorienter. Mais avant de se retrouver sur le patin de l’hélico prêt à se faire treuiller, le cheminement est long et prends du temps. En France, pour être secouriste, il faut intégrer la Police Nationale ou la Gendarmerie même si dans certains départements, les pompiers peuvent également intervenir. 

De nombreuses questions se posent à ce moment-là. Quand on parle de secours en montagne, on occulte bien souvent l’institution dont il fait parti. Dans notre milieu de la montagne, l’image de la police est un sujet complexe et nuancé. L'image des CRS en particulier est principalement associée aux opérations de maintien de l'ordre faisant l'objet de nombreuses critiques médiatiques. Alors des réflexions importantes surgissent. Suis-je fait pour représenter les CRS et la Police Nationale ? Mon tempérament correspond-t-il au corps de la police ? Comment cela sera perçu par mon entourage ? Ce n’est pas anodin d’entrer dans cette institution. Le doute ne s’installe pas longtemps. Dans mon esprit, la police incarne les valeurs de la justice, de la sécurité et de la protection de tous. Celles-ci correspondent également aux valeurs du secours en montagne. 

Mon inscription au concours de gardien de paix faite, c’est le temps des révisions qui commence. Il faut clairement se mettre dans le bain. La première épreuve est l’épreuve écrite. Elle évalue les candidats sur des connaissances générales de la police, les capacités de compréhension, le raisonnement logique et les aptitudes orthographiques. Nous sommes des centaines (voir des milliers) à se retrouver dans l’immense halle de Martigues. Je laisse mon imagination errer sur les différents profils des personnes autour de moi. Le sujet arrive, nous avons quatre heures. Rien d’extrême a priori, je me concentre et réalise mes exercices. J’essaye d’être consciencieux car si l’on échoue à une des épreuves du concours, c’est retour à la case départ. J’ai l’impression de revivre les épreuves du probatoire du guide, mais dans un nouvel univers. Heureusement, mes années de fac me servent à quelque chose, comme dirait mon père. Les résultats de la première épreuve tombent quelques semaines plus tard. Ils sont positifs et je passe à l’étape d’après.

La deuxième épreuve est l’épreuve physique. Rien de tel qu’un bon test d’endurance en deux parties, un luc-léger et un parcours d’obstacles. Vu mon amour inconditionnel pour la course à pied, il a fallu que je m’entraîne. Le luc-léger est hyper spécifique, on effectue des allers-retours sur 20m dans un temps imparti. Et bien sûr, le rythme s’accélère à se faire exploser le cardio. Pour le parcours, il s’agit d’obstacles à franchir (poutres, barrières, …) en étant le plus rapide. Les résultats sont quasiment connus à la fin de l’épreuve puisqu’ils sont calculés en fonction de nos temps.

Une étape de plus franchit, place à la dernière. La troisième et dernière épreuve est l’épreuve orale. Celle-ci consiste en un entretien individuel avec un jury constitué d’officiers, de commissaire et de psychologue. Nous sommes évalués sur nos motivations, nos connaissances du métier de policier ou notre capacité à réagir face à des situations concrètes. Changement d’ambiance. Je pensais etre préparé mais pas du tout. L’expérience est horrible. Le jury m’attaque sur chacun de mes propos. Pas le temps de m’expliquer ou de me justifier, qu’ils redoublent de remarques. Je me sens complétement asphyxié. 

Je n’arrive plus à aligner deux phrases. Je sors de l’entretien usé et dépité. Dans ma tête il faudra revenir l’année prochaine. Les résultats sont plusieurs semaines plus tard et déterminent le dénouement du concours. Je me connecte sur le site et comme pour le proba, nous devons chercher notre nom dans la liste des admis (bien plus grande dans ce cas là). Surprise ! Je m’y trouve. C’est un vrai soulagement car je passe in extremis. La première grosse étape est validée. Le processus pour entrer au secours en montagne est encore long. Il faut maintenant intégrer et se former en école de police pendant plusieurs mois. En attendant cette échéance, il est temps de regrimper en montagne. 

Dans la continuité de ce récit, Antoine nous explique la suite de son quotidien de secouriste : Parcours d'un secouriste #2 : l'école de police (article prochainement disponible). 

Avant de se lancer dans cette aventure, Antoine a validé son diplôme de guide de haute-montagne à l'ENSA. Une aventure qu'il retrace à travers une série d'articles pour découvrir l'envers du décor : Parcours d'un jeune guide #1 : prendre sa décision. 

Cet article est illustré par le CNEAS CHAMONIX que nous remercions.